Lady Bye — Talking Insects

Carambolage entre un son, une attitude, résumons-les «punk», et le seul sujet de cet album: l’accident de Lady Di dont la voiture percute dans la nuit du 31 août 1997 le 13e pilier du tunnel de l’Alma. C’est le pont casse-gueule tenté par la futée Clara Jasper alias Lady Bye, tout au long de ce «Talking Insects». En 1977, «God Save The Queen» barrait le visage de la reine, traînée de vitriol sur l’icône désuette et adorée. Shocking! Malcolm McLaren avait réussi son coup de théâtre avec ses marionnettes punk. L’irrévérence était au rendez-vous mâtinée d’une violence bravement incarnée par Sid Vicious et Johnny Rotten. Le «no future» y était un cri monté en épingle. Même ulcération, tout autre pourtant est le «no future» de Lady Bye. Remisés la panoplie vestimentaire, les bitures, la défonce et l’air mauvais. Restent le son sale des guitares, hargneuses, la voix souple et rêche débitant sur un beat de matraque, avec ce seul message à délivrer: c’est triste une femme qui meurt, fût-elle la Princesse de Galles. Car – et c’est là l’immense fossé – où les Sex Pistols crachaient sur le portrait de la reine mère, Lady Bye pulvérise les nuées d’insectes qui se sont précipités sur le cadavre encore chaud d’une femme en morceaux. Une femme est morte. L’évidence est bonne à rappeler quand la défunte est la princesse la plus médiatique du moment. Accident de voiture stupide, banal, brutal, et tragique surtout, comme les routes en comptent par centaines de milliers chaque année dans le monde. Sur une musique sèchement électrique réduite à trois accords et beaucoup plus de décibels, Lady Bye pose avec «Talking Insects» un regard lavé de tous les filtres pour qu’émerge cette évidence balayée par la société du spectacle: une femme est morte, paix à son âme (prêter une oreille à «Alma», titre d’introduction, qui joue habilement sur «l’âme» en espagnol et le nom du tunnel fatal). Le «no future» découlant de ce constat: une femme se crashe contre un pilier et les insectes en font leur miel.